En résumé
• Des compagnies facturent les bagages en cabine pour augmenter leurs revenus.• L'Espagne inflige des amendes pour pratiques trompeuses, comme le camouflement des coûts réels.
• Une harmonisation des règles est demandée pour éviter des frais cachés sur les bagages cabines.
Prendre l’avion sans valise est-il une option réaliste ? Pour un nombre croissant de compagnies aériennes, la réponse est oui. Ces dernières années, certaines ont décidé de facturer l’utilisation des compartiments à bagages situés au-dessus des sièges, limitant la gratuité aux seuls sacs pouvant être placés sous le fauteuil du passager. Cette pratique, initialement introduite par les compagnies low-cost, s’est progressivement répandue, soulevant de nombreuses critiques.
Les passagers, souvent attirés par des billets à prix réduits, découvrent au moment de finaliser leur réservation que le coût du voyage peut rapidement grimper. Un bagage cabine, pourtant considéré comme une nécessité par beaucoup, devient alors un supplément payant, parfois aussi cher que le billet lui-même. Cette évolution a conduit la justice européenne à s’intéresser au sujet, tandis que certains gouvernements, comme l’Espagne, ont décidé d’intervenir.
Une bataille juridique qui s’intensifie
La question des bagages à main payants a pris une ampleur nouvelle avec les récentes décisions judiciaires. En Espagne, cinq compagnies aériennes – dont Ryanair et EasyJet – ont été condamnées pour pratiques commerciales déloyales, avec des amendes totalisant plus de 180 millions d’euros. Le ministère espagnol de la Consommation leur reproche notamment de masquer ces frais supplémentaires et d’induire les voyageurs en erreur sur le véritable prix du billet.
Du côté des compagnies aériennes, la réponse ne s’est pas fait attendre. « Nous allons évidemment nous opposer, comme toutes les autres compagnies, à cette décision de justice », a déclaré Thomas Haagensen, directeur des marchés du groupe EasyJet. Selon lui, le principe du paiement à l’usage est plébiscité par les consommateurs, et la facturation des bagages cabine n’a rien d’illégal tant qu’un petit sac gratuit reste autorisé.
Les autorités européennes, elles, restent prudentes. La Cour de justice de l’Union européenne avait déjà rappelé en 2014 que le bagage cabine était un élément « nécessaire du transport de passagers » et ne devait donc pas être soumis à des frais additionnels, à condition qu’il respecte des dimensions raisonnables. Plus récemment, en 2023, le Parlement européen a appelé à une harmonisation des règles, mais la Commission européenne n’a pas entièrement suivi cette recommandation.
Un enjeu économique et commercial
Derrière ce débat juridique, c’est tout un modèle économique qui est en jeu. Depuis le début des années 2000, les compagnies low-cost ont construit leur succès sur un système de tarification modulaire : billets attractifs auxquels s’ajoutent de nombreux frais optionnels. En facturant les bagages à main, elles optimisent l’espace en cabine, accélèrent l’embarquement et génèrent des revenus supplémentaires.
Cette approche a tellement bien fonctionné que certaines compagnies traditionnelles ont partiellement adopté ce modèle. Plusieurs d’entre elles proposent désormais des billets « light » ou « basic », qui excluent la franchise bagage en soute et restreignent certains services. Néanmoins, elles continuent d’inclure un bagage cabine sans frais, ce qui marque une différence notable avec les transporteurs low-cost.
Si les décisions judiciaires en Espagne et en Europe se généralisent, les compagnies aériennes concernées pourraient être contraintes de revoir leur politique tarifaire. Pour l’instant, elles restent sur leurs positions et attendent les résultats des recours déposés contre les amendes infligées.
En attendant, pour les passagers, la prudence reste de mise. Lire attentivement les conditions tarifaires devient indispensable avant d’acheter un billet, sous peine de voir le coût total du voyage dépasser largement les attentes initiales.