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1,3 million de passagers laissés pour compte après des vols annulés et retardés : êtes-vous concerné ?

Vincent Mabire - Il y a 7 heures

En résumé

• En 2024, 83% des passagers français privés d’indemnités pour retards ou annulations.
• Les compagnies exploitent des stratégies dilatoires pour éviter les remboursements.
• Absence de sanctions fortes maintient un système où les droits des passagers sont bafoués.

En 2024, le ciel européen a été marqué par une série de retards et d’annulations de vols ayant touché des millions de voyageurs. Si certains aléas étaient inévitables, un chiffre interpelle : une grande majorité des passagers français concernés par ces perturbations n’ont pas reçu la compensation à laquelle ils auraient pu prétendre.

Entre méconnaissance des droits, inertie administrative et stratégies dilatoires des compagnies aériennes, la question des remboursements devient un enjeu bien plus vaste que le simple respect de la réglementation. Le rapport d’AirHelp dresse un constat sans appel. Voici ce qu’il révèle.

La réglementation européenne sur les indemnisations est claire, mais elle est systématiquement contournée

Depuis 2004, le règlement CE 261/2004 encadre les droits des passagers en cas de vol annulé, retardé ou surbooké. Il fixe des compensations forfaitaires allant de 250 à 600 euros, selon la distance parcourue, dès lors que le retard dépasse trois heures ou que l’annulation intervient tardivement. Ce droit est valable jusqu’à trois ans après le vol et ne s’applique pas uniquement aux vols européens, mais également à tous les vols opérés par une compagnie de l’Union européenne, quel que soit le pays de destination.

En théorie, tout passager impacté peut réclamer cette compensation. En pratique, seulement 17 % de ceux qui y avaient droit en 2024 ont effectivement obtenu gain de cause. Cela signifie que 1,3 million de passagers français sont passés à côté d’un remboursement légitime. Pour un grand nombre d’entre eux, aucune circonstance extraordinaire ne justifiait un refus. Le contournement ne se fait donc pas sur une base légale, mais bien via des procédures d’usure : délais de réponse anormalement longs, demandes de justificatifs excessifs, refus non motivés.

Ce contournement systématique a un effet direct : des centaines de millions d’euros économisés chaque année par les compagnies aériennes, sans réelle conséquence sur le plan juridique ou financier.

L’année 2024 a été marquée par une explosion des perturbations dans le trafic aérien

Le rapport d’AirHelp révèle que près de 90 millions de passagers dans le monde ont été concernés en 2024 par des vols retardés ou annulés, dont plus de 8 millions en France. Parmi eux, environ 2,4 millions avaient droit à une compensation. Or, seule une minorité a réellement vu l’argent arriver sur son compte.

Cette explosion des perturbations est attribuée à plusieurs facteurs combinés : une recrudescence des grèves dans le secteur aérien, des pannes techniques, des conditions météorologiques extrêmes, mais aussi une fragilité opérationnelle de certaines compagnies à bas coûts, incapables d’absorber les aléas. Certains aéroports ont également été à l’origine de retards en cascade, notamment en Europe du Sud pendant les périodes de forte affluence.

Face à cette situation, les compagnies n’ont pas renforcé leur dispositif de gestion des indemnisations. Au contraire, plusieurs d’entre elles ont été accusées d’avoir dissimulé ou minimisé les raisons des annulations, classant arbitrairement certains événements comme « extraordinaires » pour échapper au versement de compensations. Ces pratiques ont nourri un sentiment d’injustice généralisée chez les passagers et relancé le débat sur l’absence de sanction efficace.

Les passagers abandonnent face à la complexité et au silence des compagnies aériennes

L’un des facteurs principaux de non-recours est la complexité des démarches. Bien que les droits soient inscrits dans le droit européen, leur mise en œuvre repose en grande partie sur l’initiative individuelle du passager. Or, nombre d’entre eux ne savent pas qu’ils peuvent réclamer une indemnité, ou ne savent ni comment ni à qui s’adresser.

D’autres renoncent après une première réponse négative. Les compagnies aériennes misent sur l’usure administrative : répondre tardivement, multiplier les échanges, demander des documents inutiles. À ce jeu, beaucoup de voyageurs préfèrent laisser tomber, surtout pour des montants qu’ils jugent modestes au regard de la démarche à entreprendre. Cette stratégie est d’autant plus efficace qu’aucune autorité de régulation n’impose de traitement rapide ou impartial.

Certaines plateformes comme AirHelp ou Flightright proposent désormais de prendre en charge les demandes en échange d’une commission pouvant atteindre 30 % de la somme perçue. Le succès de ces acteurs tiers démontre que le système actuel est défaillant, au point qu’une industrie entière s’est construite pour combler le vide laissé par les autorités et les transporteurs.

L’absence de sanctions permet aux compagnies de prolonger des pratiques abusives

Malgré les alertes répétées d’ONG et d’associations de consommateurs, aucune sanction dissuasive n’a été mise en place pour contraindre les compagnies à respecter leurs obligations. En France, la DGAC (Direction générale de l’aviation civile) intervient ponctuellement, mais sans pouvoir contraignant fort. Au niveau européen, la Commission rappelle régulièrement le droit, sans en garantir l’application.

Le résultat est un cercle vicieux : les compagnies continuent de refuser ou retarder les indemnisations sans crainte de sanction, tandis que les passagers, mal informés et découragés, renoncent à faire valoir leurs droits. Cela crée un climat d’impunité, où les abus sont non seulement tolérés, mais intégrés au modèle économique.

Tant que des mesures contraignantes – amendes automatiques, injonctions de remboursement, procédures collectives facilitées – ne seront pas mises en œuvre, la situation restera inchangée. Le rapport d’AirHelp sert donc aussi de signal d’alarme aux institutions : sans pression réglementaire, le droit à l’indemnisation restera un droit théorique, inaccessible dans la pratique pour des millions de voyageurs.

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Vincent Mabire - Il y a 7 heures

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